
Bon alors au niveau de l'écriture, c'est pas vraiment du "bon" Claude Nicolet, alors que bien d'autres de ses ouvrages sont bien mieux écrits. Là c'est vraiment de l'écriture "érudite" et donc je ne le vous conseille pas si vous voulez pas vous prendre la tête.
Pour le fond, Nicolet essaie de comprendre l'idée républicaine et d'y dresser un tableau du 18ème siècle (ca parle même de Bodin au 17ème siècle) jusqu'au années 1924. C'est très intéressant, et on suit avec intérêt l'histoire de cette idée, et surtout la définition de cette idée. On s'aperçoit que les Lumières étaient en majorité monarchiste, mais les révolutionnaires se sont nourris d'eux pour appuyer l'idée républicaine. On parle aussi d'illustres inconnus pourtant important, comme les Idéologues, puis d'autres mieux connus comme Ferry, Gambetta ect.
Enfin, je vais en venir en ce que j'ai le mieux aimé, c'est les tentatives de définir cette idée républicaine. Moi avant de lire ce livre, j'avais déja exposé maladroitement, sur le chat, que la République se doit être une sorte de continuité de l'Antiquité. Cl. Nicolet définit beaucoup mieux que moi, il dit ( je cite de tête) : " l'idée républicaine c'est de croire que la liberté des Anciens est possible de nos jours". Cette conception antiquisante (plutôt qu'antique) se retrouve tout au long de l'histoire de l'idée républicaine, à travers les révolutionnaires se réclamant d'Athènes et de Rome, jusqu'a Clemenceau qui se prenait comme un nouveau Démosthène, essayant de prendre exemple sur sa vie.
Mieux que cela, Nicolet essaie de définir l'idée républicaine par exclusion des idées démocratiques anglo-saxonnes : en effet, y'a t'il une différence entre la révolution américaine et française au niveau des idées ? Pour l'auteur, oui il y a des différences, deux, notamment.
La première, c'est que l'idée républicaine française ne s'appuie, ni sur la Réforme, ni sur la religion catholique, apostolique et romaine. L'idée républicaine est d'abord une idée laïque. Elle n'a pas cette sorte d'articulation profonde et religieuse entre le protestantisme " libérateur" chez les anglo-saxons, et la démocratie qui est en soit une continuité de cette religion, on élit son pasteur, et tout le monde en soit peut exercer la prêtrise chez les protestants. Mais, plus étonnant, note Nicolet, c'est que la religion catholique n'a aussi aucune influence sur l'idée républicaine. L'idée républicaine se construit donc en porte à faux vis-à-vis des religions. On citera à excès la déchristianisation brutale de 1792, mais comme le rappelle avec subtilité l'auteur, la constitution de 1795, censée ramener l'ordre bourgeois, affirme bien le principe de séparation des églises et de l'état. Jusqu'au ralliement des catholiques au toast d'Alger, les républicains, même et surtout protestants ( ce qui est paradoxal par rapport aux anglo-saxons !), agiront de tout feux pour virer les religions de l'espace public. Souvenez-vous du bon mot de Peyrat reprit par Gambetta : "le Cléricalisme ? Voilà l'Ennemi !".
Le second grand point de divergence avec les anglo-saxons, est que l'idée républicaine est profondément relié aux idées antiques de la liberté, de la libertas. Chez les anglo-saxons, il y a une coupure avec l'Antiquité, ils ne se sentent pas reliés avec cette époque, avec ces idées (peut-être est-ce du à l'articulation religieuse), même s'ils peuvent les admirer, pour eux, ce n'est pas la même chose, il est impossible de copier la liberté des Anciens pour la transposer dans le monde moderne. C'est le contraire pour l'idée républicaine comme je l'ai dis plus haut. Pour les républicains français, au contraire, la France est la nouvelle Rome et la nouvelle Athènes à la fois. Il n'y a pas de coupures, il n'y a pas de mise à distance de l'Antiquité, la Révolution et la République SONT la continuité de l'Antiquité pour les révolutionnaires et les républicains. L'auteur note à ce propos que cela fait une graaaaaaaaaaaaande ellipse d'un bon millénaire et quelques, mais il dit bien que cela importe peu pour l'idée. Les révolutionnaires (et donc de facto les républicains) ont construit cette idée, certes, mais contrairement aux anglo-saxons, ils ont construit cette idée comme une continuité de l'idéal civique de l'Antiquité.
Bon, je vous rassure, y'a pas que ca, comme je vous l'ai dit, dans ce livre, on va dire que ce sont les parties qui m'ont le plus passionnées.
Par contre après, n'essayez pas de réfléchir s'il reste encore une idée républicaine de nos jours, c'est la depression qui arrive très vite.
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